En quoi les communautés de pratique sont bénéfiques ?

En quoi les communautés de pratique sont bénéfiques aux entreprises ? L’interview de Lusine Arzumanyan

26 Sep, 23 | Interviews d'experts

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En quoi les communautés de pratique sont bénéfiques aux entreprises L’interview de Lusine Arzumanyan

En quoi les communautés de pratique sont bénéfiques ? Les entreprises font face à un environnement en constante évolution, où les compétences et les connaissances jouent un rôle clé dans leur succès. Dans cette ère de l’information, il est essentiel pour les organisations de trouver des moyens novateurs de favoriser l’apprentissage, le partage de connaissances et le développement des compétences au sein de leurs réseaux.

Dans cet article, nous examinerons avec Lusine Arzumanyan comment les communautés de pratique peuvent être utiles aux entreprises. Par ailleurs, nous mettrons en évidence les bonnes pratiques pour les mettre en place et les freins éventuels. Nous explorerons également la notion de KPI ou d’indicateurs de pilotage pour réussir le lancement de ces communautés.

« Je suis enseignante-chercheure à l’IDARC Business School, j’ai fait une thèse sur les communautés de pratique en innovation en me basant sur l’exemple du Groupe SEB.”

Pourquoi avoir fait une thèse sur le thème des communautés de pratique ?

 

Je réalisais mon mémoire de fin d’études sur le groupe SEB en étudiant les relations sièges/filiales. Au même moment, la direction de l’innovation au sein du groupe SEB avait le souhait de créer une communauté pour capitaliser les connaissances, créer des liens et d’accélérer l’innovation entre les business units. L’opportunité s’est donc présentée de continuer sur cette thématique pour un sujet de thèse.

Cela m’a permis d’étudier de près les communautés pendant 4 ans, de la création du projet jusqu’à son aboutissement.

 

Communauté de pratique : définition et bénéfices

 

Je pense que la meilleure définition de communauté de pratique a été donnée par Etienne Wenger en 2002. Dans un premier temps, il définit une communauté comme un groupe d’individus ayant en commun un domaine d’expertise. En second temps, il ajoute que ce groupe d’individus a pour objectif de résoudre un ensemble de problèmes ou partageant une même passion, le tout en interagissant sur une base régulière. On retrouve donc dans cette définition les trois volets domaine, pratique et communauté. 

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Par ailleurs, pour l’entreprise, les communautés permettent de résoudre des problèmes rapidement et de gagner du temps. Au sein du Groupe SEB, j’ai fait le constat qu’une personne avait une réponse en 48h maximum après avoir demandé de l’aide. Le premier bénéfice est donc d’accélérer la résolution des problèmes.

En second temps, cela permet d’innover car les membres d’une communauté vont parler des tendances sur le marché, des nouvelles technologies et faire de la veille stratégique. Le bénéfice suivant est donc de booster l’innovation.

En troisième temps, les communautés permettent de créer une base de données ou de connaissances. C’est une sorte de Wikipédia consultable à tout moment que l’on peut partager à des novices par exemple. Le troisième et dernier bénéfice est donc de capitaliser sur les connaissances acquises

Ainsi, sur le plan individuel, il y a aussi beaucoup de bénéfices à rejoindre une communauté. C’est une source de connaissance très grande, cela favorise la création d’un réseau et facilite l’accès à des experts.

 

Quelles sont les bonnes pratiques pour déployer une communauté de pratique en entreprise ?

 

#1 Animer, c’est la clé !

Tout d’abord, je crois beaucoup au rôle d’animation. Pour moi, c’est très important de suivre et d’animer cette communauté, non pas pour la contrôler mais pour mettre à disposition aux participants, des outils facilitant les échanges. Un animateur se doit de relayer les informations entre les membres, de créer les mises en relations et d’aider à dynamiser la communauté. 

Malheureusement, on ne peut pas compter seulement sur la bonne volonté des participants car les gens ont aussi d’autres préoccupations et auront donc besoin d’un cadre et d’une organisation afin de réguler l’activité de cette communauté. 

#2 Avoir les bons outils pour être efficace

Ensuite, il faut avoir les bons outils car si l’outil n’est pas à la hauteur, cela peut impacter la vie communautaire. Cela peut fragiliser les échanges si les outils sont trop complexes.

#3 Créer du contenu pour fournir des ressources aux membres

Le risque dans ce cas est de créer de la lassitude chez les membres ou du désintérêt. Un membre qui a des ressources à disposition et qui peut alimenter ses réflexions est un membre qui aura une activité régulière au sein de la communauté. L’outil choisi doit être simple d’utilisation ou user-friendly et qu’il corresponde à la cible de membres au sein de la communauté. 

 

Quelles sont les barrières que peuvent rencontrer les community builders ?

 

Il existe des barrières de participation chez les membres. Les community builders y font face régulièrement. J’en distingue trois principalement : 

  • Les barrières technologiques : clics (outil user-friendly), 
  • Les barrières humaines : elles reposent souvent sur des idées reçues, la peur du jugement ou le manque de temps.

En réalité, il s’agit d’une question de priorités. Un exemple auquel j’ai été confronté était que les membres au sein de la communauté ne partageaient rien en interne et beaucoup sur LinkedIn. Le constat était que les membres préféraient travailler leurs images professionnelles et leur employabilité. 

  • Les barrières organisationnelles : elles sont plutôt axées sur les politiques de partage des information, la concurrence entre les business units, le choix des canaux de communication qui sont peut-être floues, ou la structure organisationnelle globale qui limite les échanges.

 

Comment piloter une communauté de pratique ? 

 

D’après moi, les KPI sont très difficiles à mettre en place car ils doivent être cohérents avec la communauté. Dans le cas d’une communauté d’innovation par exemple, que j’ai beaucoup étudiée et observée, il est difficile de savoir d’après les échanges si le groupe a créé un nouveau produit ou non. Si les membres n’en parlent pas, l’information n’est pas diffusée.

En général, pour piloter la communauté de manière plus globale, on se basait sur le nombre de participants. Cela nous permettait de travailler la quantité afin d’atteindre la qualité. Dans une communauté il y a trois niveaux de membres : 

  • Le noyau dur, ou les membres qui créent et alimentent la communauté,
  • Les membres actifs qui interagissent, commentent et participent,
  • La périphérie qui représente à peu près 60% et qui concerne tous les autres membres inactifs.

En conséquence, c’est difficile de mesurer et piloter lorsqu’on a seulement un noyau dur et peu de membres actifs. L’intérêt de mesurer le nombre de membres est donc très important pour avoir une base de membres solide.

Par ailleurs, certains indicateurs dits généralistes liés à l’activité sont aussi pertinents : 

  • le nombre de posts, 
  • le nombre de réactions, 
  • le nombre de commentaires,
  • le nombre de problèmes résolus,
  • etc.

Pour mesurer l’efficacité d’une communauté, il est intéressant de voir le nombre de demandes d’aide qui ont amené à une solution. Pour moi cela est très révélateur, je les appelle success story. Ces success story peuvent totalement être un KPI quantitatif qui serait une preuve irréfutable de la réussite communautaire. 

Pour conclure, j’ai plusieurs livres à partager dont deux principaux que je recommande vivement de lire car ils sont très riches : “Les communautés d’innovation : De la liberté créatrice à l’innovation organisée” et “Le guide pratique des communautés : Un nouveau souffle pour les organisations”.

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