Into the Tribes, une exploration d’un an à travers l’Europe pour découvrir l’art de faire communauté - Wudo

Into the Tribes, une exploration d’un an à travers l’Europe pour découvrir l’art de faire communauté

Avr 22, 2024 | Interviews d'experts

Hugo Paul, 25 ans, est un explorateur des communautés. Il part à la rencontre d’une diversité de collectifs pour créer des ponts au service du bien commun. Sensibilisé très tôt aux enjeux sociaux et environnementaux, il s’engage dès ses 18 ans dans une diversité d’initiatives : il coordonne une coalition nationale pour la transition de l’enseignement supérieur, il participe à des communautés internationales d’acteurs du changement, il mène des plaidoyers nationaux comme les Grandes Écoles de la Transition

Au travers de ses engagements, il se forge une conviction : “C’est à l’échelle des collectifs que nous pourrons mener les transformations sociétales et individuelles dont nous avons besoin”.

Une conviction qui le mènera à lancer en 2023 le projet  Into the Tribes : une exploration d’un an pour étudier l’art de faire communauté.


Pendant un an, il sillonne l’Europe pour s’immerger dans de nombreux collectifs. Parmi ces nombreuses expériences : il s’isole un mois dans une abbaye pour découvrir la vie monastique, il étudie des communautés apprenantes comme l’Alma Forest School, ou encore, il part à la rencontre des Samis, le dernier peuple autochtone d’Europe.

Hugo Paul - Into The Tribes - Portrait lors de son expédition communautaire à travers l'Europe.

Portrait d’Hugo Paul – Into The Tribes lors de son parcours communautaire en Europe.

De retour d’exploration, il s’est donné une mission : partager l’art de faire et d’apprendre ensemble pour répondre aux enjeux de demain.

Avec deux mots d’ordre : 

 

Entretenir la flamme de l’engagement communautaire

L’engagement est le souffle de votre communauté. C’est ce qui permet au collectif de réaliser sa mission, d’atteindre ses objectifs. Réunir des personnes ensemble, c’est bien, mais les faire avancer dans la même direction avec conviction et enthousiasme, c’est mieux. 

 

La flamme de cet engagement trouve selon moi sa source dans deux éléments essentiels : une motivation profonde qui réside en chacun de nous et une reconnaissance extérieure qui nourrit notre volonté d’agir. Lorsque ces deux forces convergent, elles alimentent une dynamique collective puissante et durable.

Au cours de ma quête des communautés, j’ai eu la chance de découvrir sur mon chemin : l’Alma Forest School (ou Alma pour les intimes). Située au sud de l’Espagne, cette école est, comme son nom l’indique, une Forest School (ou école dans la nature en français). Bien plus qu’une école, ils se définissent eux même comme une tribu apprenante.

 

À leurs côtés, j’ai compris qu’il était nécessaire de lier la motivation intérieure à la valorisation extérieure pour favoriser l’engagement de ses membres de manière autonome

 

Avant chaque projet collectif, les élèves sont accompagnés pour définir des objectifs personnels en parallèle de leurs objectifs collectifs. Cette dimension personnelle est extrêmement importante pour maintenir son engagement sur le long terme, en particulier lors des moments difficiles. Savoir pourquoi l’on fait les choses et pourquoi l’on a rejoint ce collectif est une source incroyable de motivation. Cela nous permet aussi d’adapter notre comportement en fonction des objectifs recherchés. Un membre n’agira certainement pas exactement de la même façon s’il souhaite approfondir ses connaissances sur un domaine ou si son objectif est d’améliorer son réseau professionnel.

 

Mais cette quête personnelle ne fait pas tout. Nous sommes avant tout des êtres sociaux ayant besoin de reconnaissance du groupe. C’est pourquoi la motivation principale des élèves réside surtout dans l’opportunité de partager leur travail au reste de leurs camarades. Dans une communauté, il n’y a rien de plus important que de valoriser ses membres. Cela peut passer par des certifications, une mention dans les canaux de communication, ou tout simplement d’une tape sur l’épaule. 

 

L’art de l’accueil, le refuge solidaire

Lorsqu’une nouvelle personne entre dans votre communauté, l’accueil est un moment charnière pour la suite de son expérience. Loin d’être anodin, il marque le début de l’aventure collective que vous allez vivre ensemble. 

Cette première impression peut créer les bases d’une relation saine et durable. Pour autant, en la négligeant, vous pouvez complètement ruiner l’expérience de la personne au sein de votre collectif.

 

Cette notion de l’accueil n’a jamais pris autant de sens à mes yeux qu’au Refuge Solidaire. Ce refuge s’occupe de l’hébergement d’urgence des exilés à la frontière entre le France et l’Italie. L’accueil est au cœur de leur mission. Malgré les urgences qu’impose ce type de lieu (préparation des repas, logistique, gestion des tensions, etc…), j’ai rarement vu autant d’attention portée à cette première rencontre.

Et si je devais retenir une chose de cette expérience, ce serait celle-ci : “Il est plus facile d’ouvrir une nouvelle porte, lorsque l’on sait qu’une personne nous attend derrière”.

 

C’est pourquoi, la porte du Refuge est toujours ouverte ! Qu’importe l’heure à laquelle vous arrivez, il y aura toujours quelqu’un pour vous accueillir. Non pas un post-it qui vous indique un lit, ou une pancarte qui vous demande d’attendre dehors, mais bel et bien une personne en chair et en os.

Et je peux vous dire que cela fait toute la différence !

 

Même si cet accueil est bien sûr d’une tout autre dimension pour des personnes exilées venant de parcourir de nombreux kilomètres, je pense que chaque communauté peut s’inspirer de cette hospitalité.

 

Incarner vos valeurs dès ce premier contact est le meilleur moyen pour les diffuser au travers de chacun de vos membres.

Mais surtout, en accueillant personnellement chaque nouvel entrant, vous vous assurez que tout le monde est bien équipé pour vivre l’aventure collective de votre communauté !

  • Ont-ils toutes les informations pour comprendre le fonctionnement de la communauté ?
  • Ont-ils les outils communautaires nécessaires pour naviguer dans celle-ci ?
  • Ont-ils besoin d’assistance particulière ?

 

Ce “sas d’entrée” est un moment clé pour créer le triptyque essentiel à la coopération : CONFIANCE, LÉGITIMITÉ et SÉCURITÉ.

La plupart des communautés que je rencontre le réalisent en asynchrone (un simple livret d’accueil, un questionnaire en ligne, etc…). Pour autant, je suis persuadé que le temps consacré à les faire en personne a bien plus de valeur. Un investissement en temps, pour plus de richesses humaines.

 

Raviver des feux de camps, les Samis

Vous êtes-vous déjà retrouvé autour d’un feu de camp à conter des histoires, ressasser des souvenirs ou tout simplement parler de la pluie et du bon temps ? Avez-vous déjà ressenti la chaleur des flammes qui vous invitent à vous rapprocher et à partager cette atmosphère chaleureuse avec vos voisins et vos voisines ? Vous savez, cette ambiance intime qui vous pousse à vous livrer aux autres, à vous confier en toute transparence ?

 

Ces sensations, je les ai ressentis à la fin de chacune de mes journées lors de mon immersion chez les Samis, le dernier peuple autochtone d’Europe. Leurs premières traces remontent à plus de 12 000 ans, alors qu’ils occupaient à l’origine les terres qu’ils appellent Sápmi (et que nous appelons la Laponie). Vivant principalement de la pêche et de l’élevage de rennes, ils sont aujourd’hui environ 80 000 à revendiquer cette culture entre la Norvège, la Suède, la Finlande et la Russie.

Hugo Paul – Into The Tribes – Les Samis

 

Vivant avec une famille d’éleveurs de rennes pendant plusieurs semaines, une journée ne se terminait rarement sans un feu de camp. L’occasion de se retrouver en famille, faire griller quelques morceaux de viande et partager le récit de sa journée.

 

Cette tradition du feu de camp a été au cœur de nombreuses sociétés à travers le monde. En tant qu’être humain, nous avons toujours ressenti le besoin de se retrouver et de socialiser. C’est le feu de camp pour les Samis, les temples pour de nombreuses religions et en quelque sorte la machine à café des entreprises. 

 

L’enjeu lorsqu’on anime une communauté, est de créer un lieu de rassemblement à son image, un lieu qui incarne ses valeurs et sa vision du monde. Il doit être à la fois inclusif pour que tous vos membres aient envie de venir et convivial pour qu’ils y restent ensuite. En fait, vos membres doivent s’y sentir “comme à la maison”. 

 

Ces espaces de rencontres vous permettront de créer les liens de confiance et d’authenticité nécessaire à la coopération entre vos membres

 

Conclusion : nous sommes faits pour être en communauté

Cette exploration Into the Tribes m’a convaincu d’une chose : nous sommes faits pour être en communauté. Nous, Homo Sapiens, avons évolué en collectif, grâce au collectif. Beaucoup moins bien doté physiquement que les autres espèces, nous avons compris qu’il était nécessaire de s’entraider si nous souhaitions survivre. C’est cet élan vital qui nous a permis de développer les capacités de coopération que nous connaissons aujourd’hui. 

 

En m’immergeant dans la diversité de ces communautés, j’ai pu observer toute la puissance du collectif. Une puissance fragile qui repose sur une subtile alchimie humaine.

 

Car animer une communauté n’est pas une science sûre, c’est véritablement un art ! Un art qui s’adapte à la singularité de chaque communauté. Un art que l’on pratique de mille manières. Alors oui, il existe quelques principes qui nous aident à animer des communautés, mais l’essentiel reste de se les approprier. Ajustez ces méthodes à votre culture et suivez votre intuition. 

Découvrez Into The Tribes en vidéo :

 

« La grandeur d’un métier est avant tout d’unir les hommes ; il n’est qu’un luxe véritable et c’est celui des relations humaines. » – Saint Exupéry

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